L’image me colle à la peau. Tactile, elle bave sur le lit et les reflets du mur. Dans ma chambre, je rejoue deux séquences de films qui agissent en diptyque. Je les cartographie sur mon drap, je les chorégraphie avec mon corps. Ainsi les personnages prennent vie dans l’espace de la regardeuse, délocalisant les images en un lieu intime, celui de nos perceptions.
Dispositif technique/ La peau verte : Pour faciliter son incrustation dans une image, on utilise des fonds de couleur verte ou bleue, à cause de leur grande différence d’avec la couleur de nos peaux d’humains. Ici, j’ai demandé à l’algorithme d’incruster une image étrangère à mon environnement, mais à l’endroit de mon propre corps. Pour cela, à la place de la couleur verte du fond, je sélectionne une des couleurs de ma peau. Dans ma chambre, les différentes variations lumineuses sur mon corps nu inscrivent une image bavante et instable, avec laquelle je joue en direct. Visuellement, la performance décrit cet emboîtement délicat, entre moi et mes fantasmes, entre la spectatrice et l’actrice, entre l’écran et la caméra, rassemblés dans la même image. Émerge une chimère, sorte de monstre à deux têtes, un corps impossible. Pour jouer ce jeu, mon regard reste rivé sur le camécran. Même quand les personnages ont les yeux fermés, je garde un œil ouvert : la chimère est double, elle est vue et voyante.