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                              Selima KAROUI

                                            et à la Chapelle des Carmélites

                                                             et Sans Titre

                 de résistance/ nous n’avons pas éjecté/ pour subir de nouveaux barbouzes/ qui sont en train de s’implan-
                 ter dans tous les secteurs de l’Etat… »

                 A ce moment, « la voix in » est en train de préciser la violence des menaces, un lendemain qui oppresse.
                 On entend des courses précipitées sur l’asphalte. Derrière, la voix n’est plus qu’éclats : « Hypothèse/ risque
                 de porter un coup fatal/ respectée/ populaire/ enjeu/ important. » Le silence tombe tout à coup. Et le noir
                 de la salle pèse ou soulage, on ne sait pas trop. Lumière. La chaise vide est là, devant l’écran. On l’avait
                 oubliée. Elle nous fait signe et ce signe angoisse…

                            Le lendemain, deuxième performance à la Chapelle des Carmélites. Pas de matériel vidéo.
                 Rien qu’une présence vivante dont on s’était à peine aperçu. Une voix, la même voix qu’hier, mais singu-
                 lièrement apaisée. Ce n’est plus de l’improvisation. La lecture d’un texte. Un extrait de Sade, en l’occur-
                 rence. Lu comme on lirait pour soi. Simplement. Ouvertement ? La voix n’est même pas tamisée par le
                 voile. Elle nous atteint directement. Un peu plus tard la même voix. Le ton est peut-être plus assuré.
                 Quelque chose de didactique ? La langue étrangère, maintenant, berce aussi davantage nos oreilles. La
                 lectrice est sérieuse, mais colorée, charmante. Sa voix sait maintenir une atmosphère sacrée que ce lieu
                 plus qu’un autre peut recueillir. Nous assistons à une fable. La Fontaine n’est pas loin qui nous parlait d’ha-
                 bit et de moine. Je vois dans cet apologue la démonstration que la laïcité est la vraie liberté, celle de
                 respecter infiniment ce qui est écrit, parce que c’est écrit et que chacun d’entre nous est le récepteur de la
                 chose écrite - et publiée, rendue publique - et qu’étant récepteurs, nous sommes incités à comprend-
                 re les mots qui nous atteignent et à réfléchir sur eux, à les réfléchir peut-être aussi, pour d’autres, et
                 pour d’autres encore. Trans-mission.

                                                                                                            Jean-Claude Thiriet

Performances - Processus                                                                                                          87
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