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Vidéo Traverse Vidéo 2016 - L’atypique trouble 27

nous invite à un exercice de « réveil » de nos luttes intérieures, à transformer ces images en expériences
personnelles, pour devenir spectateurs de nous-mêmes, déclenchant ainsi une réfexion critique de
nos propres actions et de leurs conséquences.


Vincent CAPES, Ignotum per ignotius, 4 : 07 min., Fr.

Tout est feu. Embrasse-moi. Attrape ma main, ma hanche ou ma queue.
Nous nous tenons sur le toit du monde. Plongeons dans ce rêve éveillé, dans cette fèvre des sens.
Le premier temps de l’Univers brillait de désir, Je garderai par trois fois le silence,
Il n’y avait ni crainte ni châtiment. Jusqu’à ce que tu m’emmènes dans la chambre la Shekinah.
Sous les cèdres et les cyprès éternels, Le temps passe sur les corps enlacés dans l’acte sexuel
Nous léchions le miel et la myrrhe qui coulaient du printemps. Comme le tigre se meut dans l’espace en quête de sa proie.
Puis nous avons plongé dans l’obscurité humide du fond Sur le chemin étoilé jusqu’à ton vagin,
de l’être Je sillonne sans retenue ce chaos agencé dont l’opulence
Pour y cacher nos sentiments, nos émotions, pour les mettre émerveille.
à l’abri. Notre révolte souveraine se réveille et gronde.
Il m’est arrivé depuis, je ne peux mentir, Elle se soulève et se cambre comme les reins suspendus
De porter mes lèvres sur des objets sans désir, dans l’orgasme.
Ou l’envie de s’avaler soi-même devenait La tête recouverte par les gouttes de la nuit,
Le doigt de St-Thomas pénétrant la fêlure du divin. Mon sperme dessine des fresques pariétales sur les cavités
Il est rassurant de comprendre que nous ne sommes rien, secrètes de ton sexe.
Moins que rien, Et j’arrache ce moment sublime aux griffes avides du temps
Car cela veut dire qu’en nous retournant Pour le remettre à sa place, le propulser dans l’éternité.
Nous deviendrons enfn quelque chose. Les drapeaux en berne, les machines saignent et meurent.
L’espoir et l’attente se mêlent au rêve et à l’égarement Nous vivons sans aucun doute une nouvelle fn du monde.
Dans une danse où le perdu retrouvera l’imminent pour Dieu n’est que l’homme d’un dieu encore plus grand,
s’y engloutir à nouveau. Il est un enfant caché sous la table distribuant la galette
Et même si nous sommes prisonniers du ventre de cette des rois.
horrible baleine, Il m’apparaît dès lors évident que nous traversons la vallée
Jouir est encore la meilleure façon d’attendre que passe de la mort,
la nuit de notre ignorance. Et il n’y a pas meilleur compagnon que toi.
Nous errons dans la forêt du monde sans être sûrs de revenir. Le jour qui point n’est pas cette lumière qu’on imagine,
Nous cherchons avidement ce qui pourra nous dévorer : Mais la soudaine prise de conscience de l’obscurité qu’on
Le hurlement du loup, le soulèvement de la marée, le ras- vient de traverser.
semblement de la tempête, Notre toile d’araignée sera remplie de gouttelettes
L’excès de vertige, l’urgence du bleu du ciel, son éclat Qui seront autant de petits bonheurs,
insoutenable. Agrippant timidement chaque lueur lancée par l’aube
Les mots timides tâtonnent mes lèvres Dans la rosée du matin.
Comme nos mains cherchent dans l’obscurité, joie mêlée Réveille-toi.
d’angoisse. Nous avons franchi le seuil.
L’ombre est un trou dans le tissu de la lumière, le silence
est l’ombre portée de la langue.
La moiteur de mon souffe chaud se presse contre ton oreille.
Le désir comme un brusque éclair tombe avant que le
tonnerre ne gronde.
Le chant de l’extase s’élève de cette immense nuit stellaire.
Nos incomplétudes s’explorent et cessent de croire aux
mondanités.
Elles renient les conventions pour s’oublier dans la volupté.
Le feu circoncis l’éternel retour,
Des ailes nous pousseront et je viendrai te prendre.


- 2. Cinémathèque de Toulouse -
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