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Vidéo Traverse Vidéo 2016 - L’atypique trouble 32
Marie DAUVERNE, SeWenir, 3 : 31 min., Can., GIV
Ecriture à petits coups d’aiguille : coudre c’est écrire. En russe, c’est
aussi monter des flms… le jeu de mots se fait littéral comme quand le
poème de Prévert blesse l’œil du pape d’un éclat de verre… le choix
entre partir et rester se fait, lui dans la chair du doigt, le majeur pour
le premier mot qui se défait en le tirant simplement, l’index sur lequel
le fl fait des nœuds et résiste : « Partir, ça tire. Rester, c’est compliqué ».
L’absence sonore donne de la distance mais les légères marques de la pointe de l’aiguille ou de peau
levée prouvent que dans l’apparent recul et l’humour envers soi, sur ce qui vous arrive, cela blesse. Coudre
majuscule tente ainsi de ret/enir au moins la trace de ceux partis. Simone D.
Shayo DETCHEMA, L’hiver inconsolable, 3 : 40 min., Can., GIV
Une pluie de points de couleurs couvre en mouvement le champ que
traversent deux fgures au corps étrangement en torsion, tête du même
côté que le dos et les jambes. Homme et femme, ils portent la même
« petite robe noire », selon le syntagme des couturiers, et se tiennent
dans la position tendue des mannequins alors que le bas de leur visage
est marqué d’une tache ou de barbe noire.
Une danse les réunit ou les désassemble, chacun quittant le champ par la droite ou la gauche ou ensemble
par le haut et le bas ; leur monde a perdu l’orientation… leur duo se prolonge en frise horizontale exhibant
leurs fesses mais levant les bras hiératiquement et traversant l’espace ; avec des distorsions de la
musique, ils sont multipliés jusqu’à cinq, se superposant ou en surimpression… ils gigotent jusqu’à que
des volets se ferment, les annulant ; un seul demeure après tant de disparitions, puis seulement deux
têtes s’envolent, demeurent en haut et disparaissent. Ainsi peu à peu, leur existence est touchée ou
leur envol avéré, selon cette métaphore flée du corps touché, se débattant pour être avant de quitter
ce lieu dont le titre poétise la douleur. Simone D.
L’artiste explicite cette image : « En s’inspirant des rituels du quotidien, (elle) explore les possibles de
l’intimité et poétise la maladie. Habités par les multiples deuils d’un long parcours avec le VIH/sida,
des personnages auto-représentatifs déflent dans l’hiver perpétuel. Différents tableaux en mouvement
évoquent de possibles délivrances ».
Annick DRAGONI, Légende, 8 : 00 min., Fr.
Entièrement réalisé avec les images de synthèse du logiciel Google
Earth, Légende est un voyage à la fois poétique, conceptuel et absurde
dans une réalité diminuée. La musique accompagne des dialogues
entre des voix de synthèse qui s’interrogent sur le sublime, la carto-
graphie, les arts numériques ou encore la place du spectateur. Les
vues 3D, obtenues à l’aide d’algorithmes qui mêlent prises de vue
de Google Street View et vues satellitaires, sont déformées, altérées, trouées. Ce qui va à l’encontre
des projets de la multinationale, puisque Street View prétend à l’exhaustivité, en scannant et archivant
le monde dans la plus grande base de donnée photographique, employant des systèmes tels les
Google Glass censés créer une réalité dite « augmentée », selon l’idéologie d’un monde connecté,
transparent, interactif.
Contre ces projets, j’ai détourné ces images, en ôtant toutes les informations connexes - nom de rues, coor-
données géographiques, informations sur les magasins -, avant d’imaginer un parcours qui commence à
- 3. L’isdaT -