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Vidéo Traverse Vidéo 2016 - L’atypique trouble 29

du générique, censé lancer le pacte de lecture du flm. En effet, la vidéo rassemble une série de huit
« imitations » de générique d’ouverture de flms cinéma. Intentionnellement, leur style diverge afn
de connoter leur origine diverse, différents réalisateurs, diverses époques et pays d’origine, alors que
j’ai moi-même flmé et monté les plans, et attribué à chaque séquence un déflement de noms fctifs.
Ainsi uniquement constituée de « faux » génériques, Last Call en une distance ironique, amorce un
ensemble de flms cinéma qui fnalement ne commenceront jamais…


François GAGELIN, Vague baignoire, 2 : 00 min., Fr., ESAD Reims
Etrange association, Vague baignoire réunit le lieu : le terrain désolé
d’une déchèterie avec ses bennes pleines et ses faques d’eau croupie
et une baignoire incongrûment occupée par un homme apparemment
inanimé.
Si un travelling au plus près, découvre après un bras nu, une blessure
qui saigne à la poitrine puis l’homme, un zoom arrière ouvre le champ au plan d’ensemble de cet espace
déshérité. La vidéo se saisit de toute l’échelle du plan pour une étrange relation avec la peinture d’histoire
par la reconstitution d’un tableau La Mort de Marat de David. Œuvre emblématique commandée aussitôt
après l’assassinat par Charlotte Corday, liée aux Girondins contre lesquels luttait Marat, fgure tout aussi
emblématique de la Révolution Française, intransigeant et dévoué à la cause du peuple. La baignoire est
actuelle mais cachée par le drap idoine, l’homme porte de même le turban alors lié à cet usage ; la plume
est encore dans sa main ainsi que la page qu’il écrivait, le billot de bois support ne se risque, en revanche,
pas à imiter la signature du peintre. L’huile sur toile disait la mort par les nuances de la carnation et la tache
rouge...le tableau de 128 x 165 cm, placé en hauteur à la Convention attirait le regard qui devait faire le
tour des indices et preuves de l’attachement au peuple, avec l’assignat et le texte qu’il écrivait, de son
humilité le drap est reprisé. La vidéo n’endosse pas ce rôle politique, elle déborde la fxité et les limites
du champ jusqu’à annuler le tableau ; elle adopte le regard documentaire sur des zones que la peinture
académique a longtemps oubliées, le crime est aussi celui de la nature… cependant, Vague baignoire
prouve que l’on ne fait jamais table rase des images qui nous ont précédés. Simone D.

Sam HEYDT, Born in your bed, 6 : 00 min., EU.
Né dans votre lit, le titre déroge de sa fonction d’amorce car de repos
et de naissance, il ne s’agit pas mais plutôt de torrent en images, porté
par un tempo répétitif et tumultueux. L’artiste tend un regard critique,
politique contre notre monde dévoré par le consumérisme jusque dans
les images censées vouées à l’art. Elle évite le piège et la contradic-
tion puisque le footage malmène ses emprunts puisés dans tous les
genres depuis les années 50, dans un crescendo du passage jusqu’au ficker qui les déconstruit. Elle
raie, rature, peint sur ces fgures qu’elle ravale au même degré de consommable : journaux, images
fxes, photogrammes et vidéogrammes, séries TV, flms de famille ou de genre, documentaire ou flms
érotiques. Ainsi s’insurge-t-elle contre l’obscène de cette violence non reconnue voire appréciée alors
qu’elle aliène les hommes, et elle le fait sans ajouter de l’illusion mais en secouant les yeux et l’esprit.
Simone D.
Elle explicite hors cadre son projet : « L’illusion ne nous libèrera pas de la réalité. Nous vivons une époque
d’anxiétés et d’espérances continuellement reportées, où les tabloïds produisent une fction qui, ainsi
ressassée, fnit par devenir réalité historique. Alors que la frontière entre la vie, l’art et la télévision se
délite de plus en plus, la pauvreté de l’expérience aux mains de notre société hyper-accélérée pose
- 2. Cinémathèque de Toulouse -
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