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Vidéo Traverse Vidéo 2016 - L’atypique trouble 36


Anna HAWKINS, With Outthrust Arm, 5 : 00 min., Can., GIV
With Outthrust Arm retient sur le Net des flms amateurs du Laocoon
et ses fls, œuvre canonique de l’art occidental exposée au musée
du Vatican. Ces images ont été détourées, fragmentées et combinées
pour créer une sculpture inouïe qui pourtant reprend la forme de la
statue originelle. En bricolant les diverses sources, la pièce reconstitue
en effet, la sculpture emblématique à travers la perception du public
par appareil interposé. Grâce à une technique de masquage de trame par trame - découpe numérique
sur une partie d’une trame d’image animée de son arrière-plan - chaque fragment de chaque plan est
ainsi isolé et la sculpture ainsi brisée en morceaux virtuels. Chaque segment garde la trace de la main
tremblante du caméraman qui a flmé et le mouvement des images a été manipulé un minimum, afn
que la présence de la personne flmée soit toujours perceptible.
Les segments de la statue combinés et recombinés, les parties déconnectées recherchent leur propre
position alors que le processus est délibérément apparent, laissé dans un état mal dégrossi. Ce faisant, la
reconfguration des œuvres d’art, l’expérience et l’histoire sont rendues visibles et manifestes. Simone D.


Jeanne HELD, L’étranger, une lumière noire et verte, 7 : 25 min.,
Fr., ENSAD Paris
Le flm se concentre sur des fragments du texte centrés sur le
procès, qui décrivent la posture de Meursault comme specta-
teur singulier face à un groupe, spectateur exposé au regard
de l’assistance, répondant à l’acception d’étranger comme
« différent-différé ». Meursault n’épouse jamais tout à fait son
propre point de vue, il constate non seulement ce qu’il vit
et sent mais fait part de l’instant présent comme perçu du
lointain et le flm développe le rapport concret entre la mise à distance de sa sensation et la violente
proximité de sa perception. Le flm retient sa capacité à se focaliser sur des détails, celle d’entrer par
ces mouvements de « macro-sensiblité » dans une autre temporalité, ainsi que sa propension à annihiler
une sensation lorsque celle-ci vient à le toucher de trop près. Un tel jeu de points de vue qui épousent ou
non le fait, s’articule autour de deux espaces, l’un haptique, dont les matières, bruits et patines rappellent
à la présence, l’autre optique, dont les réalités sont mises à distance. Ainsi l’animation opte-t-elle
pour la peinture à l’huile, ainsi les effets prêtés à la perception de Meursault, agglomèrent-ils êtres
et espaces, et tout mouvement est-il pris dans la couche d’une même matière. La lumière qui donne
à voir et aveugle se manifeste comme une strate qui recouvre cette synecdoque du tribunal. Si en
photographie, l’objectif qui zoome s’apparente au regard qui accommode, l’émergence de points
nets en peinture provoque le mouvement inverse : ce n’est plus l’oeil qui choisit mais le monde qui se
révèle plus en détails ou se fait plus opaque. Le médium de la peinture photographiée ancre l’image
projetée dans ce partage des dimensions optique et haptique. Simone D. d’après la synopsis de l’artiste


Laurie JOLY / Parya VATANKHAH, (RE)ACTIONS, 6 : 42 min., Fr.
Un incipit en ficker, de bandes verticales où s’entr’aperçoivent des corps, une répé-
tition en accélération aux sons saccadés, l’attaque contre la visibilité ouvrent la
vigilance. Il devance et amorce un diptyque : deux femmes, deux artistes, deux
écrans simultanés, deux paroles contre la censure et l’obscurantisme. Laurie
Joly et Parya Vatankhah, chacune occupe un champ et agit, sans costume
- 3. L’isdaT -
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