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Vidéo Traverse Vidéo 2016 - L’atypique trouble 42


Sarah OUAZZANI TOUHAMI, Berceuse, 7 : 12 min., Fr.
En accord avec la promesse du titre, la vidéo se fait musicale, organisant
des phrasés rythmés plus que racontant une séquence de mère à
l’enfant, ou que décrivant un enfant à endormir. Sa partition emporte,
cependant, dans un autre rythme que la comptine ; sons des profondeurs,
écho sur écho vidéo s’accordent davantage aux miroitements marins
alternés à des éclats de lumière sur fond noir, et aux retours des vagues sur elles-mêmes. Ils suivent la
découverte des rochers du bord de mer avec ses nageurs ou fâneurs, l’entrée dans l’eau d’une femme
enceinte, la nage et plus tard, un vacancier ramant dans une Marine avec Marseille au loin sous le soleil
couchant. Un glissando se fait, du paysage vidéo à la touche picturale ; le plan s’embrase, se rosit et le
doré de la lumière devient orangé, devient mer de Monet, en transformant ses teintes et d’abord bleu
avec trait de lumière comme ce Impression soleil levant qui a donné le nom - d’abord en dérision puis en
reconnaissance - à l’impressionnisme amoureux des changements opérés par la lumière et les guettant.
Berceuse entre dans ce plaisir afn d’accueillir l’enfant bercé, cajolé par sa mère, et ce, sans tomber dans le
tableau de genre, puisqu’ils sont entr’aperçus, en légère surimpression de couleur, dans un triangle formé
des rochers entre lesquels la mer poursuit son inlassable mouvement. En rapprochant le mythe de la mer/
mère, qu’elle enlace au souvenir du bercement par le liquide amniotique, la vidéo protège l’intime et dit
l’affectif. Simone D.

Dénes RUZSA / Fruzsina SPITZER, Job Interview, 3 : 35 min., Hong., CJC
Une voix standardisée venue de nulle part envahit l’espace, assaillant le
candidat à l’embauche d’une série de questions classifées y compris le piège
du pourcentage de réponses qu’il estime avoir justes. Ni bureau - meuble ou
espace -, ni humains, mais dans un non-lieu, une silhouette puis deux, puis
une demi ligne, puis deux jusqu’à ce que devenue point, elle se perde dans
la multitude. Elles sont aussi choquées entre elles dans des croisements et totalement aveuglées alors
que les questions pleuvent. Pas de lendemains qui chantent quand l’humain est menacé de perdre non
seulement le travail - alors que le robot en décide - mais ce qui le fait humain. Simone D.


Claire SAVOIE, Aujourd’hui (dates-vidéos), 5 : 44 min., Can., GIV
Fondée sur une tentative de saisie du moment présent dans sa
nature instable et fuyante, l’œuvre Aujourd’hui (dates-vidéos) a
été entamée en février 2006. De très courtes vidéos, de 4 secondes
à 4 minutes, sont réalisées de façon quotidienne selon un proto-
cole spécifque. À ce jour - 25 avril 2016 - près de 1300 vidéos ont
été ainsi produites.
« Claire Savoie se consacre depuis 2006 à une œuvre continue,
Aujourd’hui (dates-vidéos), dans laquelle elle interroge les données fondatrices de l’expérience humaine
par l’examen d’instants singuliers de sa propre existence. L’œuvre consiste en une forme de calendrier
aux fns duquel l’artiste consigne sur vidéo un moment très bref de sa journée, dont elle cherche ensuite
à faire voir la complexité et l’épaisseur par un fn travail d’interaction de l’image avec des éléments
textuels et sonores. Modestes, ces mini-vidéos forment pourtant en s’accumulant rien de moins qu’une
vue en plan large du montage infni dont est constitué chaque sujet humain et (…) rendent surtout
visible la perte inaliénable de notre expérience. »
Anne-Marie Ninacs, source : Le mois de la photo à Montréal, http://moisdelaphoto.com/
- 3. L’isdaT -
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