Page 136 - catalogue 2017
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Installations 9. Cinémathèque de Toulouse - boucles sur écran
Sans déplacement réel aux lieux de vie de l’écrivain, la quête se
resserre dans la réplique de son appartement new-yorkais, en un
noir et blanc connotatif de l’ambiance de cette œuvre littéraire. Une
silhouette découpée, sans épaisseur s’y meut le long d’un rail, de
pièce à pièce, les portes s’ouvrant à son approche mécanisée, sans
efets d’humanisation.
Lovecraft se cloîtrait dans son appartement pour échapper aux
monstres extérieurs que sa xénophobie ne pouvait que multiplier.
Une voix acousmatique masculine qui défe les afects, s’adresse
sans recherche de complicité à un spectateur susceptible de
retrouver, tout au long, des signes indiciels de cette écriture, prêt à
s’inquiéter de l’ambiance si proche de celles de l’écrivain qu’il sache
ou non l’issue de cette vie, qu’il en connaisse ou pas les phobies et
la violence, qu’il en sache ou pas l’antisémitisme, le racisme et la misanthropie.
Des fragments de flms, souvent documentaires, loin de la plate citation deviennent matériaux d’écriture, ils inscrivent
l’œuvre dans les années 20-30 et dans les lieux américains comme Providence – Rhode Island ou New York.
Ces fragments ne font cependant pas accalmie, des silences lourds président à ces images, emportées par l’écriture
audiovisuelle. Images composites en collage, animation, superposition, incrustation en un morcellement toujours
inquiétant à l’image de cet écrivain.
Le Cas Lovecraft reconnaît, y compris par l’emploi de « le cas », la réalité de cet homme, il n’édulcore pas son idéologie,
tout en induisant qu’elle sourd en métaphore dans son œuvre ; mais ne la développe pas, dans son éloignement du
documentaire canonique et parce que rien ne remplace la lecture d’une œuvre littéraire, même si un tel flm en fait
percevoir l’esprit.
Simone Dompeyre
Cf. Pierre DESPRATS, Maxime MARTINOT, Benjamin HAMEURY, Return to Providence, p.64
Céline TROUILLET, Song n°7, 3min40 et Song n°10, 3min50 (Fr.)
Les courtes vidéos de Céline Trouillet s’inspirent en partie des clips
vidéo et du karaoké de la fn des années 80. Son rêve d’enfance
était d’être chanteuse mais elle a rapidement compris que ce
n’était qu’une illusion car elle est malentendante. Ainsi, quand elle
flme des personnes, en quelque sorte elle se flme elle-même.
La série de ces portraits chantants a débuté comme une réfexion
concernant les difcultés liées à la communication. Tous adoptent
le gros plan, échelle de plan venue peut-être de ce qu’elle lit sur
les lèvres ce qui induit le rapprochement pour communiquer et
chacun est flmé en caméra fxe et une prise continue. Deux types
de chanteurs s’y exercent, certains plus ou moins professionnels
et d’autres totalement amateurs. Les premiers répondent à un
concept et ne cherchent pas forcément à donner une image
personnelle des protagonistes alors que les autres composent des
refets de la personne elle-même, reléguant au deuxième plan, la
qualité du chant.
La série des Song retenant des personnes qu’elle croise dans le
cours de sa vie quotidienne, en quelque sorte serait un échantillon
non-scientifque de la société française d’aujourd’hui.
Très souvent, ces personnes ne sont pas très visibles dans
notre société, comme les handicapés alors qu’ils y participent
pleinement.
D.S
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