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Cinéma Le Cratère  Projections

hommes sur le corps des femmes, Tu n’aimeras point de Haïm Tabakman, en 2009,
franchit le pas en y situant la revendication de l’homosexualité. Ce film militant et
sensible se fonde sur l’amour, et non seulement, il explicite le poids des interdits sur
le couple hétérosexuel des ultra-orthodoxes mais inversement revendique l’amour
homosexuel. L’immersion de deux hommes dans un bassin à ciel ouvert hors de
la ville en est l’image emblématique à tel point qu’elle figure sur l’affiche. Adrian
Garcia Gomez se fraie dans cette lignée avec son propre Mikvé qui, comme son
précédent film La Mesa où deux cowboys du Mexique rural s’aiment, réveille des
échos cinéphiliques comme celui du Secret de Brockback Mountain d’Ang Lee, tout
en se nourrissant du réel social et biographique.

En effet, il y décrit le bonheur d’être en
amour, précisément dans cette immersion,
non pratiquée seul mais avec son mari comme
gage d’être deux, d’être ensemble.

En creux, par la simplicité, le « allant de soi »
de leur comportement et de leur vie, il accuse,
à son tour, le gouvernement israélien de refuser
de reconnaître ce mariage. L’entrelacement de l’animation qui portraiture, en traits
précis, les deux hommes, avec la prise de vue de plans de nature et aquatiques du
lieu d’immersion oppose l’oasis de paix à l’inanité d’une administration leur réclamant
encore et encore de prouver la réalité de la légalité de leur relation.

L’animation fait respiration dans le maelstrom d’images de la vie avec les voyages,
accompagnés, au début par l’image sonore topique du train, avec les lieux visités
églises, synagogues, monuments historiques, avec les rencontres, les relations
familiales et amicales, les preuves de relations aux autres des bébés aux adultes
hommes et femmes, avec des objets de décoration, du patchwork coloré aux
statuettes, avec des actes de lecture ou les repas autant d’indices d’une vie
« normale », civique et les étreintes et baisers de leur relation amoureuse.

Le montage court mêle aux photographies et aux dessins, des formulaires en langue
anglaise à ceux en écriture hébraïque de l’attestation de Pacs aux visas et factures et
permis de résidence avec les toponymes New York, Londres, Israël.

Se détache de cette vie en accélération, que certaines phrases musicales répétitives
surenchérissent, l’accalmie de cette immersion que Adrian Garcia Gomez glisse
en leitmotiv avec quelques variations : le visage des deux hommes est d’abord
sans précision – cela concerne tout couple amoureux – le visage est parent aux
photographies : la biographie s’atteste ; le visage est couvert de feuilles en flicker –
accord avec la nature – les hommes nagent, d’abord les bulles de la respiration

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