Film | 0:04:50 | Espagne | 2018
OraProNobis
Ora pro nobis/Priez pour nous, cette intercession psalmodiée lors de la litanie des saints ou adressée à la Vierge dans l’Ave Maria/le Je vous salue Marie s’entend cyniquement en humour noir. Ce footage réveille ou rend hommage ou se distancie jusqu’à attaquer les films dont il emprunte des plans iconiques comme sonores.
OraProNobis garde son aplomb en un montage déchaîné d’images de films noirs, de thriller, de revenants dévorateurs de cadavres et de western, genre qui n’a pas davantage lésiné sur la violence et la mort.
Les topoï s’y bousculent couteau, revolver et autres armes, visage blême du menacé, rictus du menaçant, porte que l’on barricade, murs que l’on frôlent, gesticulation et jambes levées des danseuses de boîtes de nuit… Le plan augural s’en distingue, par sa précision et sa reprise et parce que s’y entend en in, l’appel au secours au téléphone de La charmante demoiselle blonde inquiète. Cependant, ce plan s’il n’annonce pas la déconstruction du plan, atteste du statut footage de films de genre alors qu’à sa suite, et précision et reconnaissance de la source sont aussitôt refusées.
Sont plutôt de règle, les superpositions du même ou de plans divers, les teintages ou les colorisations ou solarisations partielles de tel ou tel objet ou membres du corps.
L’accélération et/ou la répétition du geste, la concaténation de fragments ne prennent pas le modèle de la prière mais avancent en rock and roll, selon la musique endiablée de Juan Carlos Martín de Valladolid, Sofa TV.
Si des fragments de scène se dessinent – l’attaque, le guet, la dévoration du cadavre, c’est que leur schéma est connu, topique et non par projet de leur faire raconter une
histoire. Rédemption de Coppola peut croiser et être croisé avec Panique à Yucca
City avec John Wayne, La danse de la vie avec La Nuit des morts vivants de Romero et quelques autres; la logique est celle de faire-vidéo en un flux mouvementé, quand elle poursuit la potentialité du film. C’est préférer le mode subjonctif du cinématographique à la coupe réglée narrative qui voudrait faire oublier qu’il y a motif à composition en actes.